Lorsqu’un sabotage d’une infrastructure technologique se produit, il n’est pas toujours évident d’avoir une idée de ses répercussions dans le temps, au-delà de la destruction de cette dernière, bien entendu.
Prenons par exemple ces armoires de téléphonie qu’on trouve un peu partout, dont plusieurs ont été incendiées pendant le mouvement de gilets jaunes, privant des zones industrielles ou commerciales entières de téléphone ET d’internet, ou celles cramées lors de manifestations récentes, privant comme à Nantes ou Lorient tout le centre-ville de téléphone/internet ou aveuglant à Paris (place d’Italie) toutes les caméras du coin après leur sabotage. Pour les amoureux d’infrastructures électriques, des centres nucléaires, thermiques, éoliennes jusqu’au plus petit pylone ou poste de transformation près de chez vous, sans oublier non plus les grandes antennes de téléphonie mobile, il existe d’ailleurs une chouette petite carte en open data, réalisée par un amoureux des infrastructures critiques, et qui répertorie tout cela en permettant de naviguer dessus avec facilité : https://openinframap.org/#2/26/12
Pour en revenir à nos moutons avec un exemple récent, dans la bonne ville de Landernau (Bretagne) le 6 décembre 2019 vers 3h30 du matin, l’armoire Orange est partie en fumée à l’aide d’un container à poubelles enflammé allée des Quatre-Vents. Parfois la méthode peut être simple pour provoquer quelque d’effet durable, et pas besoin d’aller chercher plus loin. Il s’agit même d’un beau doublé, puisque cela s’était déjà produit sur la même armoire il y a neuf mois, la nuit du 8 mars, qu’ils avaient réparée depuis (coût des répérations estimé : 30 000 €). En tout cas, si la presse locale nous précise à présent que « 1 100 lignes sont hors service, plus de 600 foyers sont privés de téléphone et Internet », cela concerne aussi particulièrement un collège et les entreprises et commerces d’une zone d’activité (celle de Bel-Air).
Et puisque qu’on parlait de conséquences durables, voilà qu’on apprend dix jours plus tard que non seulement Orange n’a pas encore réussi à tout remettre en état, mais aussi qu’ils ne prévoient pas de retour à la normale avant le 23 décembre (s’ils y arrivent), soit une vingtaine de jours minimum ! Quant à la vielle rengaine stalienne que tout cela fait essentiellement marcher les assurances, le monde capitaliste n’est pas aussi simple, comme s’en plaint d’ailleurs le chef d’une entreprise située dans la « pépinière » concernée : « Ils [Orange] ont porté plainte dans cette affaire, pour l’incendie. Mais nos assureurs nous disent qu’ils ne peuvent nous rembourser sur un sinistre qui s’est produit à l’extérieur de nos locaux. Et nous renvoient vers Orange. Qui ne veut rien entendre et qui refuse même d’étendre nos forfaits de données sur nos mobiles alors qu’ils saturent vite… »
Dernière précision fournie par ce petit môssieur qui dirige l’entreprise Anaximandre, notamment spécialisée dans le Big Data ou la « bioinformatique », puisque ce sabotage incendiaire a aussi touché le Parc d’innovation de Mescoat : le coût des dégâts se monte pour lui à « plusieurs dizaines de milliers d’euros sur les deux épisodes de cette année« . On vous laisse imaginer tous seuls la somme globale pour l’ensemble des boîtes de la pépinière innovatrice qui ne pépie plus du tout en ce moment. Tous comptes faits, une poubelle peut certainement rendre bien d’autres services que celle d’héberger des déchets, une fois déplacée au bon endroit…
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