Belgique : A chacun son laboratoire de la répression

Ce qui est chouette avec l’unification policière en Europe, c’est que d’un côté les mailles globales du filet se resserrent partout, mais que de l’autre chaque pays garde toute sa marge pour pousser le bouchon un peu plus loin. Prenons par exemple la Belgique, qui vient de prendre des mesures qui ne vont pas tarder à faire tâche ailleurs.

Ainsi en est-il de l’annonce il y a quelques jours de la multiplication par deux ou trois des 1.000 caméras « ANPR » de scan et reconnaissance automatique des plaques d’immatriculation – Automatic Number Plate Recognition – le long des autoroutes. Pour passer de 1000 à 3000, elles seront également déployées loin des autoroutes, puisque « les zones de police locale, ainsi que les communes, les provinces, les Régions et les exploitants des ports et des aéroports » pourront les déployer – soit toutes les autorités possibles. L’ensemble sera interconnecté, la Sûreté d’Etat y ayant bien sûr accès. Et qu’on ne s’y trompe pas, c’en est fini des chichis et autres cache-sexe comme la détection des excès de vitesse ou des fraudes à l’assurance. L’annonce du ministère de l’Intérieur belge est claire : l’objectif de l’omniprésence de caméras à lecture automatique de plaques est de « lutter contre la criminalité et le terrorisme ». Cela annonce de beaux jours à tous les véhicules des fichés S ou équivalent ! Pour infos, c’est l’opérateur de télécoms Proximus et l’entreprise de signalisation Trafiroad, mieux connue sous son ancien nom « Group Janssens », qui ont remporté le marché.

Mais on le sait, les routes ne sont pas tout à fait sûres, tant que le dispositif de contrôle totalitaire n’est pas complet. En plus des moyens de transport, c’est ainsi encore mieux si on peut connaître d’avance l’identité des passagers. Dans un premier temps, ce sont d’abord les aéroports qui ont été prioritaires, avec l’introduction du PNR, le registre en temps réel de données policières des voyageurs internationaux. La Belgique se flattant d’avoir été le 2e pays européen a l’avoir mis en vigueur début janvier 2018 aux normes de la dernière directive européenne passée en 2016 après les attentats de Paris, elle a décidé d’aller plus loin encore et de lancer deux projets pilotes. L’un avec Eurostar et le second avec Flixbus.

Le ministre du bon sens policier, toujours le même, a ainsi déclaré : « Cela n’a pas de sens d’exécuter ces mesures aux avions et de laisser l’accès aux bus et aux trains internationaux totalement ouvert ». Et c’est ainsi que le PNR va être élargi en Belgique à certains trains et
compagnies d’autocars afin de détecter, suivre, bloquer ou appréhender à tout moment les « passagers à risques ». Notons, et ce n’est pas surprenant -les riches ne sont pas tous débiles-, que les compagnies de jets privés et de vols d’affaires sont exemptés du PNR et de la directive européenne grâce à un lobbying réussi. Amis fichés S ou équivalent, on sait ce qui nous reste à faire !

Ce contenu a été publié dans Contre la société de contrôle et de surveillance, Répression, avec comme mot(s)-clé(s) , , , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.