Athènes, Grèce : Chronique de la guerre sociale de ces derniers jours

Le 16 septembre 2017, journée de manifestations en mémoire de Pavlos Fyssas [1], le compagnon de 16 ans Kostas B. est arrêté lors d’affrontements à Exarcheia, quartier d’Athènes de tradition contestataire avec une forte implantation anarchiste. Il a ensuite été torturé avant même son arrivée au GADA (commissariat central d’Athènes), mais la violence des flics ne s’est pas arrêtée là. Celui-ci, à l’intérieur de ce cadre de torture a également été tabassé gravement. Kostas B. a donc été torturé dans la durée et systématiquement depuis son arrestation alors qu’il était menotté dans le dos et la plupart du temps inconscient.

C’est alors qu’il était déjà quasiment inconscient suite à de nombreux coups, toujours menotté dans le dos et allongé, que les flics ont violemment écrasé ses mains avec leurs bottes pour lui fracturer les doigts, et lui ont assénés de nombreux coups de pieds au visage jusqu’à ce qu’il perde entierement conscience. Selon des rapports confirmés, il était inconscient au moment de son transfert au GADA, il a repris conscience un court moment à l’intérieur de la voiture de flic et aurait essayé de s’évader, mais il a été blessé par une autre voiture dans sa tentative d’évasion. Une situation infernale quoi qu’il en soit pour ce jeune compagnon courageux.

Il a donc été transféré au KAT (hôpital général de l’Attique) et placé en soins intensifs. Afin que son organisme soit en mesure de recouvrir de ses blessures causées par les coups féroces des flics, Kostas a été plongé dans le comma pour plusieurs jours. Évidemment, les efforts de l’Etat pour couvrir un tel incident ne sont en rien accidentels, puisque ceux-ci craignaient l’effet d’un « nouveau Alexandros Grigoropoulos » et ont donc immédiatement réagis, et le ministre de l’intérieur Nikos Toskas s’est rendu à l’hôpital dans l’heure. Cette tactique continue aujourd’hui dans la persistance à ne pas publiciser les rapports légaux. Ce à quoi les flics et médias grecs se livrent régulièrement contre les compagnons (avec photos), surtout lorsque ceux-ci sont à charges.

Une manifestation anarchiste a eu lieu samedi à Athènes contre les tortures dont a été victime Kostas B. lors de la manifestation en mémoire de Pavlos Fyssas. Elle a eu lieu avenue Alexandras et s’est dirigée vers le GADA où Kostas B. a été torturé. Les affrontements ont commencé à la tombée de la nuit dans le quartier d’Exarcheia : les manifestants ont lancé des cocktails Molotov et des pierres contre les flics qui ont fait usage de gaz lacrymogènes. Deux policiers ont été légèrement blessés et une personne a été arrêtée. Voici une vidéo de ces affrontements :

Pour information, nous publions ici quelques extraits d’un communiqué de Nikos Maziotis et Pola Roupa, membres emprisonnés de Lutte Révolutionnaire au sujet de Kostas B. :

A l’aube du 17 septembre, Kostas B., 16 ans, a été brutalement battu par des agents de police et a été reçu en soins intensifs à l’hopital KAT. La direction politique de la police, le Ministère de l’Ordre Public et le gouvernement SYRIZA-ANEL ont couvert la police, présentant l’incident comme un accident de la route. Mais une série de faits et de témoignages réfutent cela. De plus, si un accident de la route s’était produit durant une tentative de fuite de ce garçon de 16 ans, comme cela est présenté, pourquoi n’a t’il pas été directement emmené en ambulance à l’hôpital plutôt que d’être emmené au GADA (QG de la police) menotté et trainé par la police alors qu’il ne pouvait plus marcher ?

Cela s’est produit après une manifestation antifasciste qui se tenait à l’occasion de l’anniversaire de la mort de Pavlos Fyssas. La manifestation a démarré à l’ambassade des Etats-Unis, en l’honneur de Heather Heyer, assassinée à Charlottesville, aux USA, lors d’une manifestation antifasciste. La manifestation s’est ensuite dirigée vers le QG d’Aube Dorée à Mesogeion. Là, des affrontements ont éclaté avec les forces de police qui gardaient l’entrée des bureaux d’Aube Dorée.

Le conflit avec les forces répressives s’est étendu à l’Avenue Alexandras et à Exarchia alors que les manifestants se retiraient. Il y a eu des attaques contre la MAT (police anti-émeute) à Exarchia. À la fin de ces événements, Kostas B. est tombé aux mains de la police à Exarchia et a été tabassé. Pour le garçon de 16 ans, cela s’est terminé par un transfert aux soins intensifs hospitaliers où il se trouve toujours. C’est une tentative de meurtre. Mais comme cela se passe souvent dans ce genre d’événements et puisqu’il n’y a pas eu de réaction sociale ou politique immédiate, le gouvernement a couvert cette attaque meurtrière. Ce n’est pas la première fois que de telles attaques meurtrières de la police à Exarchia sont couvertes. Les médias reproduisent bien sûr la version policière et gouvernementale des événements. Une version dominée par le mensonge selon laquelle les sérieuses blessures dont souffre Kostas B. ont été provoquées par un accident de la route. L’absence de réaction immédiate à ce crime d’État a graissé les mécanismes qui ont poussé dans le sens d’une accusation de crimes graves et à d’une volonté de saisir son ADN alors qu’il est en soins intensifs. L’absence de réaction immédiate légitime le crime et pave la route des prochains.

Les flics ont une fois encore plongé leurs mains dans le sang d’un jeune homme qui a frôlé la mort. Pas sous les balles des flics, mais sous leurs coups. Et une fois encore il avait 16 ans. 15-16 ans est un âge critique pour la jeunesse d’Exarchia. Ils peuvent être assassinés de sang froid par les flics, comme l’ont été Kaltezas et Grigoropoulos, ou recevoir des tabassages assassins de la part des agents de police. Dans tous les cas ce sont des « émeutiers ordinaires ou des voyous d’Exarchia », comme l’État les appelle. […]

Aucune attaque meurtrière de l’État ne doit rester sans réponse.

[Communiqué publié le 23 septembre 2017 sur Indymedia Athens.]

Toujours à Athènes, ces derniers jours, on notera également que dans le cadre des protestations étudiantes contre une nouvelle loi qui prévoit la fin de la gratuité des livres scolaires, des anarchistes ont affrontés la police à coups de meubles, de pierres et de cocktails Molotov vendredi soir à Athènes. Des barricades ont été dressées autour de l’Université polytechnique et aucun blessé n’a été signalé. […]

NdT:

[1] Assassiné par des néo-nazis d’Aube Dorée 18 septembre 2013 à Keratsíni, en banlieue d’Athènes.

[Synthèse réalisée par non-fides de plusieurs articles parus sur Indymedia Athènes et dans la presse grecque, mercredi 18 octobre 2017.]

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