Grenoble, France : Le proc’ fait la leçon

Après les incendies des locaux de France Bleu et celui d’un local technique de l’émetteur TDF à Grenoble les 28 et 29 janvier, une revendication est parue sur Indymedia Nantes. Celle-ci précise notamment le choix de le publier d’abord là : « Parce qu’il permet d’être lu·e·s par des compas’ connu·e·s ou inconnu·e·s, parce qu’il « garantit » notre anonymat et qu’il est libre pour la publication ». Bien entendu, ce communiqué qui explicite plusieurs raisonnements à propos des médias -en citant par exemple avec ironie une des célèbres prestations télévisées du faux-ami Mathieu Burnel- a été relayé in extenso par différents sites anarchistes.

Cet après-midi 30 janvier, au lendemain de la sortie de ce communiqué, le procureur de Grenoble qui supervise les investigations a tenu à faire savoir lors d’une conférence de presse que pour lui « il ne s’agit pas d’une revendication ». Ben voyons ! C’est d’ailleurs le même qui avait déjà lancé cette ritournelle en passe de devenir un véritable mantra, « revendication opportuniste », à propos de la destruction enflammée de l’église Saint-Jacques dans cette même ville il y a deux semaines, joliment signée par des « courts-circuits ». Ce type est du genre fanatique obtus de la statistique, qui préférera logiquement toujours le quantitatif au qualitatif, le 95% au 5%. Ce type s’appelle Eric Vaillant, c’est un nouveau venu dans la place iséroise, parachuté de Guyane le 1er janvier 2019 pour remplacer son prédécesseur parti en retraite. Et comme cela arrive souvent avec les nouveaux rouages zélés de la chaîne répressive, il entend d’emblée poser ses propres marques pour confirmer à ses maîtres la justesse de leur choix. S’il a ainsi annoncé dès sa prise de fonction qu’une « de [ses] priorités sera de développer les comparutions immédiates », il a aussi développé une conception très particulière de ce que doit être une revendication en bonne et due forme. Une conception qui correspond plutôt bien avec un étroit cerveau autoritaire de procureur, celle de groupes formels stables qui font pression sur l’Etat en lui fournissant des indications suffisamment précises pour qu’il puisse en retour les prendre en considération, sur le modèle tout droit issu des groupes luttarmatistes marxistes-léninistes ou nationalistes des années 70.

Ainsi, selon ce graaand expert es-revendications, pour être considérée comme telle, « Une revendication, c’est dire : ‘Nous sommes le groupe Untel, nous revendiquons les faits et nous les avons commis de telle façon’. Ce qui est important aussi, c’est que ceux qui revendiquent donnent, et ça a été le cas par le passé, des indications sur leur mode opératoire qui permettent aux enquêteurs de justifier de cette revendication. Pour l’instant je ne vois vraiment rien de tel. ». Pas de bol pour lui, beaucoup de subversifs anti-autoritaires non seulement ne revendiquent pas systématiquement leurs attaques, mais surtout ne s’inscrivent ni dans ce genre de schémas-là ni dans aucun autre, forts de leur autonomie à la fois individuelle et projectuelle. Ils brisent les cadres établis en n’ayant d’autre référent que leur propre conscience, en ne s’adressant ni à la masse captive ni au pouvoir, mais à d’autres individus révoltés. Pas de bol pour lui, qui aimerait tant que ses petits enquêteurs acquièrent des certitudes en béton armé, beaucoup de subversifs anti-autoritaires se contrefichent des formulaires de certification exigés par les défenseurs de l’ordre et tous leurs perroquets médiatiques. A l’heure où la domination entend normer chaque aspect de l’existence, jusque ses plus intimes, il ne manquait plus que l’entrée en scène grand-guignolesque d’un carriériste qui vienne faire la leçon sur comment laisser libre cours à l’imagination rédactionnelle !

De toute façon, comme le concluait justement le texte du communiqué des derniers incendies grenoblois, les insomniaques qui se battent contre toute autorité ne dialoguent pas avec l’ennemi, ils l’attaquent, en murmurant parfois à l’oreille de celles et ceux qui savent encore recueillir les mots sortis du choeur : « Un bravo aux individu·e·s, enfin, qui, par monts et par vaux, perpétuent l’attaque et veulent tout mettre à sac. » Et on ne sache pas que le nouveau procureur de Grenoble Eric Vaillant, loin d’être aussi ouvert d’esprit ou Auguste que son homonyme, soit donc concerné en quoi que ce soit par ce texte, vu que ce magistrat comme le veut son opportune fonction, n’attaque absolument rien, sinon la liberté. Ce crime qui contient tous les autres.

L’intérieur des locaux de france bleu après l’incendie…

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