A l’heure où l’offensive des idéologues autoritaires permet de justifier tout et son contraire -qu’on pense par exemple à l’expression « barricade administrative » brandie sur la ZAD de Notre-dame-des-Landes pour entériner l’abandon de la lutte et la légalisation des occupations-, la référence à la Commune est toujours à la mode. Plutôt que mouvement offensif pris à la fois dans une guerre et dans une destruction de l’existant, ON voudrait ainsi la réduire de façon opportuniste à une pittoresque autogestion rurale alternative.
Le 24 mai 1871, et qui peut l’oublier ?, l’hôtel de ville de Paris fut par exemple réduit en cendres par un petit groupe de communards, détruisant les archives et la bibliothèque de la capitale. Les deux collections de l’état civil parisien (celle de la ville et celle du greffe) antérieur à 1860 furent à jamais perdues -grâce aussi à l’incendie du palais de justice voisin. Le 1er juillet 2018 vers 5h15 du matin, dans un geste bien plus proche de ces insurgés du passé qu’en cultivant les carottes du présent, un ou plusieurs inconnus ont entièrement incendié la mairie de Brétigny (Eure). « Les archives, l’Etat civil, les factures, l’histoire de la commune, on a tout perdu », selon la maire du village, pour laquelle en
outre « il s’agit d’un incendie criminel », puisque « on sait par où ils sont rentrés, ils ont cassé le volet et le carreau de la fenêtre pour rentrer dans le bureau », dixit une radio locale.
Au fond, tout cela n’est certainement que le fruit d’un malentendu historique : à force d’accoler artificiellement le mot « Commune » à celui de « campagne », quelqu’un a peut-être tout simplement pillé l’arsenal de cette célèbre expérimentation pour n’en retenir que le meilleur : non pas se créer une niche agricole dans l’existant, mais ré-enflammer l’imagination de ce début de 21e siècle.