Berlin, Allemagne : Marteaux, pierres et peinture contre l’imprimerie d’Etat et le groupe de presse « DuMont »
Lorsque les va-t-en-guerre des vingt États industriels les plus puissants du monde sont arrivés à Hambourg, on pouvait lire sur les couvertures de la presse du jour les termes de « Guerre civile et de terreur urbaine », « de partisans du chaos mus par la haine » et « d’incendiaires meurtriers ». Non pas pour désigner les criminels en costard-cravate dans leurs limousines blindées, mais pour diffamer, rendre illégitime et salir la révolte festive qui s’est enflammée contre le monde du G20. Presse bourgeoise, politicards et flics se sont mutuellement surpassés dans la compétition aux néologismes les plus créatifs, dans la bataille de propagande au sujet des événements. Le vocabulaire des dominants et de leurs scribouillards dociles de la presse poubelle avait pour but de nous diviser et de forcer les acteurs à agir dans la logique des criminologues afin de jeter les bases pour un traitement judiciaire des événements. Il en résulte désormais des procès-spectacle lors desquels les serviteurs de l’État appliquent « toute la sévérité pénale » pour en faire des exemples. Toutes les personnes qui ont participé à cette chasse portent la responsabilité d’avoir foutu en taule des gens à Hambourg et de les priver de liberté, probablement pour un long moment encore.
Dans la continuité de cette campagne médiatique, les fauteurs de trouble du ministère de l’intérieur comme Thomas de Maizière saisissent l’occasion pour partir en guerre contre ce qu’ils appellent « l’ultra-gauche » et pour donner une importance à son existence paranoïaque. Néonazis et fanatiques islamistes sont pour lui des terroristes, de la même façon que les personnes qui sont descendues dans la rue contre la domination du G20. La propagande pour l’état d’urgence se poursuit joyeusement. A l’intervention des unités de police antiterroriste de la SEK à la Schulterblatt d’Hambourg devait succéder deux autres cet été, comme celle lors de l’expulsion du squat de l’ancienne usine de confection de tapis (la « Teppischfabrik ») ou encore lors d’une manif antifasciste à Wurzen.
Des menottes aux pieds et des interdictions de voyager sont demandées pour les émeutiers et après que le secrétaire général de la CDU Stefan Evers a déjà exprimé au printemps dernier son rêve « de gazer les fascistes de gauche », dans la plus pure tradition nazie, il est demandé pour finir d’évacuer les Hausprojekte et centres autonomes comme la Rote Flora et la Rigaer Straße. La ZDF en remet une couche en allant chercher conseil auprès d’un politicien de l’AfD pour leur reportage intitulé « Le danger de la gauche » dans lequel elle tente désespérément d’établir un lien entre les journées de rébellion à Hambourg et la Fraction Armée Rouge afin d’étayer ses thèses sur le terrorisme.
Il est évident que le fait que les néonazis entachent de sang la république depuis de longues années représente une imperfection esthétique dans la vision du monde réactionnaire de ces théoriciens de l’extrémisme. Mais les quelques 200 meurtres racistes depuis le début des années 90 ne rentrent pas du tout dans leur comparaison gauche/droite. Il n’est donc pas étonnant que les campagnes anti-réfugiés et les mobilisations racistes des dernières années se perdent dans le consensus social alors que dans le même temps, par le biais d’une mise en scène médiatique de grande envergure, on interdit la plate-forme internet linksunten.indymedia. […]
De telles attaques contre nos structures et la répression à laquelle sont désormais confrontées les personnes incarcérées ayant pris part aux protestations anti-G20 ne nous étonnent pas particulièrement et nous n’avons finalement encore jamais cru à l’État de droit civil. Mais de voir avec quelle véhémence le pouvoir serre la vis et comment les ennemis de la liberté font tomber leur masque démocratique sans que cela ne suscite d’indignation en dit long sur l’état dans lequel se trouve leur prétendue société démocratique. Cela ne fait que renforcer davantage notre conviction que l’ordre social dominant appartient aux tas d’ordures de l’histoire.
C’est pourquoi nous avons attaqué dans la nuit du 26 au 27 septembre la Bundesdruckerei [1] et le bâtiment du groupe de médias « du Mont » de la Alten Jakobstraße avec de la peinture, des pierres et des marteaux et laissé le slogan « Free G20 prisoners ». Par ce geste de solidarité nous envoyons des salutations combatives aux prisonniers du G20 à Hambourg, aux personnes ayant créé Indymedia Linksunten, aux personnes perquisitionnées hier matin [27 septembre 2017, NdT] à 14 endroits différents à travers le „Soko Schwarzer Block“. Nous souhaitons plein de force et d’endurance à Kara et Krem inculpé.e.s à Paris parce qu’on leur reproche d’avoir participé à la destruction d’une voiture de flics.
La Bundesdruckerei, qui est de nouveau entre les mains de l’Etat depuis 2009, et la Veridos GmbH, une coopération de la Bundesdruckerei avec Giesecke & Devrient (G&D) siégeant dans le même bâtiment sont en ce moment en train de construire un pare-feu biométrique autour de l’Europe forteresse, au nom de la lutte antiterroriste. Les installations aux frontières africaines sont ainsi équipées de lecteurs de cartes biométriques et les cartes d’identité appropriées avec photos biométriques sont imprimées ici à Berlin pour les différents États africains. Le but est d’enregistrer les données biométriques de tout habitant de l’ensemble du continent afin de protéger les frontières extérieures de l’Union Européenne des mouvements migratoires en amont, sur le continent africain. La Bundesdruckerei est donc un soutien important en matière d’architecture de sécurité de l’Europe et du renforcement de ses frontières mortifères.
Le « DuMont Mediengruppe » est l’éditeur des divers quotidiens en Allemagne, notamment du Hamburger Morgenpost, du Berliner Kurier et de la Berliner Zeitung. A travers leur campagne de dénigrement et de diffamations, ceux-ci sont en partie responsables de la criminalisation des manifs contre le G20 et des attaques qui s’en sont suivies contre les structures anti-autoritaires. Eux et leurs collègues de la maison d’édition Springer [2] sont les larbins des fanatiques réactionnaires de la sécurité.
A bas l’État et ses défenseurs !
Liberté pour tous les prisonniers ! Feu aux prisons !
[Traduit de l’allemand de Chronik, 27. September 2017]
NdT :
[1] La Bundesdruckerei, que l’on peut traduit comme « l’imprimerie fédérale », est un fabricant de billets de banque, de timbres, de cartes d’identité, de passeports et visas, de permis de conduire et de cartes grises. Créée en 1879 sous le nom de « Reichsdruckerei », elle était alors au service du pouvoir jusqu’en 1945. Connue depuis 1951 sous son nom actuel, elle a par la suite été privatisée en 2000 et de nouveau nationalisée en 2009. Elle s’est spécialisée depuis dans le domaine de la sécurité, du contrôle et du fichage.
[2] Le groupe Springer a une longue histoire avec les groupes révolutionnaires. C’est entre autre le rédacteur du journal de la Bild-Zeitung, conçu sur le modèle des tabloïds anglais. Au début des années 70, ses bureaux avaient été attaqués à de nombreuses reprises, notamment pour appeler à s’en prendre régulièrement à l’extrême-gauche et aux révolutionnaires. Juste après la tentative d’assassinat d’un révolutionnaire du mouvement étudiant, Rudi Dutschke, le 11 avril 1968, ses locaux ont été attaqués lors de manifestations pour ses appels aux meurtres de militants du mouvement étudiant. Des camions du groupe ont également été incendiés.
Berlin, Allemagne : Solidarité avec les inculpé.es de l’incendie de la voiture de flics
Saluts solidaires aux ami.e.s en France. Avec un regard à la fois triste et moqueur, nous avons suivi le déroulement du procès de l’incendie de la bagnole de flics à Paris. C’est pour nous un soulagement d’entendre que certains au moins ne marchent pas avec la justice et gardent le silence. Nous souhaitons à tou.te.s beaucoup de force. Les flammes de solidarité ont suscité de la joie et certainement un peu de satisfaction. Pour plus de solidarité active et de complicité !
Depuis quelques jours se déroule à Paris le procès autour de l’incendie de la bagnole de flics.
Deux ami.es sont en détention provisoire depuis maintenant plus d’un an et une personne demeure introuvable. Après une première journée avec une forte présence ayant conduit au report du procès, on a très vite vu que la justice ferait tout pour décider non seulement du déroulement du procès mais aussi de l’ambiance dans la salle et autour du procès. Depuis plusieurs mois déjà surgit une vague de solidarité incendiaire.
Nos yeux se sont mis à briller devant les flammes d’avant-hier [1] !
Jusqu’à ce que tou.te.s soient libres !
[Traduit de l’allemand d’indymedia, 22.09.2017]
NdT:
[1] Référence à l’incendie dévastateur de la caserne de gendarmerie à Grenoble.