Besançon, France : Ne restons pas assis face au maire et sa guerre aux pauvres !

Voici un tract qui a circulé dans Besançon à l’occasion du deuxième rassemblement #jesuisassis place Pasteur, samedi 1er septembre, contre l’arrêté anti-pauvres de la municipalité entré en vigueur au début de l’été. Entre 250 et 300 personnes y ont pris part et quelques pancartes étaient visibles. Certaines personnes ont pris la parole, même si leurs discours, en plus d’être victimistes et larmoyants, étaient inaudibles, à quelques mètres seulement du sit-in. Les flics étaient absents de la place, ce qui montre à quel point ce rassemblement était inoffensif et insignifiant. Assis et immobile.

Ne restons pas assis face au maire et sa guerre aux pauvres !

L’arrêté « anti-mendicité » adopté par la municipalité LREM du maire Jean-Louis Fousseret début juillet suscite une indignation depuis mi-août dans les rangs de la gauche locale. Divers partis et politiciens font des appels à s’asseoir sur la place pasteur en soutien aux SDF et marginaux visés par cet arrêté, pour demander son retrait, toujours dans le cadre des lois qui ont elles-mêmes été décrétées par les riches et les puissants.

Le 31 août 2018, à la veille d’un nouveau rassemblement assis place Pasteur, le maire a supprimé cet arrêté pour le remplacer par un autre quasi-identique, qui sera en vigueur sur la même période, soit jusqu’au 30 septembre puis du 30 novembre au 31 décembre (période de fêtes de fin d’année oblige). En supprimant du texte le mot « mendicité [agressive] », il tente de calmer la mobilisation. Il ne s’agit évidemment pas d’une « première victoire » des opposants, puisqu’en supprimant cet arrêté, ça permet au maire de faire capoter deux recours devant la justice.

Quoi qu’il en soit, cet arrêté reste une dégueulasserie de plus de la part du pouvoir. La mairie cherche à la fois à satisfaire les demandes des bourgeois du centre-ville (commerçants de l’UCB et riverains en tête) et à répondre aux impératifs de la consommation de masse. Pour le maire, c’est aussi un moyen de brosser dans le sens du poil une partie de son (possible) électorat en vue des prochaines élections municipales.

Mais cet arrêté largement médiatisé est l’arbre qui cache la forêt. A entendre tous ces démocrates de gôche, on devrait tomber des nues face à cette mesure anti-pauvres. Comme si l’existence de l’argent et de l’exploitation ne créait pas de fait des inégalités sociales et économiques. Comme si les autorités locales (la mairie, la Communauté d’Agglomération du Grand Besançon…) et les riches ne multipliaient pas les méga-projets de centres commerciaux, les écoquartiers aux pieds du tramway, ne se lançaient pas dans une rénovation urbaine sans limite, à travers laquelle se renforcent chaque jour le contrôle et la surveillance sur l’ensemble de la population et notamment sur celle que les bourgeois appellent « à risque » (SDF, « zonards », « jeunes à casquettes » et tout individu qui s’attarde un peu trop longtemps sur la voie publique). Cet aménagement urbain a non seulement pour but de faciliter le travail des forces répressives, mais aussi de créer des espaces aseptisés, où personne n’a envie de s’attarder ni de squatter avec ses potes. Les seuls endroits où l’on a le droit de se poser (sans être sous l’œil d’une caméra, et encore) sont dans les espaces marchands (terrasses de café, bars, etc…). La ville doit être un espace dédié à la circulation des flux, toujours au service du capital.

Reste à savoir quelles pistes sont à explorer dans cette lutte contre la guerre aux pauvres. Entre rentrer dans le cirque démocratique, de la représentation et du spectacle ou se jeter dans la lutte directe contre le monde des riches et de l’autorité, il faut choisir. Rester assis sur une place à écouter les lamentations de quelques tribuns sur la politique du maire – fût-elle « mauvaise » – ou solliciter la justice pour faire supprimer cet arrêté au nom des chimériques « droits humains » (comme si la justice allait désavouer les autorités et ses hommes qui rédigent les lois et la font fonctionner…) est sans doute le pire à faire dans de pareilles circonstances. Par contre, cibler les responsables, les exposer à la vue de tous sur la voie publique et leur causer le maximum de dégâts nous montrent que l’on peut agir concrètement sur le cours des choses, que l’on n’est pas impuissant-e-s face à cette arrogance de la bourgeoisie et la misère grâce à laquelle elle prospère.

Cet été, quelques anonymes, las de la pacification et de l’acceptation de ce quotidien mortifère, ne sont pas restés assis ni les bras croisés. Ils ont fait preuve de volonté et d’abnégation à l’heure où les citoyens dorment : leurs attaques nous montrent que la révolte face à cette société autoritaire et inégalitaire est possible et bel et bien vivante.

Le 18 juillet, six voitures du Grand Besançon sont incendiées sur le parking de l’institution à la City. Quelques minutes plus tard, les flammes ont ravagé cinq voitures flambant neuves des matons du SPIP, avenue Clémenceau. Les prisons, tout comme les dispositifs de (chantage à la) réinsertion auxquels se livre le SPIP, sont la face d’une même pièce : celle du contrôle et de la domestication des plus pauvres qui ne rentrent pas dans le cadre des lois et de l’exploitation capitaliste.

Le 18 août, quelques heures après le rassemblement assis place pasteur aux côtés des partis politiques de gauche, des distributeurs de plusieurs banques sont sabotés au centre-ville. Leurs écrans sont soit fracassés au marteau, soit recouverts de peinture rouge. La joyeuse balade nocturne ne s’arrête pas là, puisque sur la façade de la mairie s’affiche désormais le message « Pas de banques pas de mendiants » et « ACAB » [All Cops/Capitalists Are Bastards].

Et quelques mois avant… Le 16 septembre 2017, les systèmes de paiement par carte bleue des commerces de l’artère principale du centre-ville sont hors-service. Les câbles de téléphones longeant les façades d’immeuble de la Grande Rue ont pour la plupart été sectionnés au cours de la nuit. Résultat : plus d’internet pour les magasins et les banques. Ce sabotage a paralysé l’activité commerciale du centre-ville toute la journée de ce samedi.

Lutter contre ce qui cause nos malheurs et nos misères n’est pas une chose abstraite. Elle se matérialise par tout un tas d’institutions et entreprises… De l’Union des Commerçants de Besançon (rue Mégevand) aux banques, en passant par les agences immobilières, la mairie (et ses véhicules que l’on peut trouver partout), le journal local « L’Est Républicain » (qui relaie quotidiennement la propagande des flics et des commerçants…).

Note :

[1] où le harcèlement des policiers municipaux envers les zonard-e-s n’a rien de nouveau : au moment du chantier des Passages Pasteur, les flics du maire distribuaient des PV à la pelle à celles et ceux qui buvaient leurs bières sur la place. Un autre façon de dire « dégage » à celles et ceux qui n’ont pas les thunes pour se payer un verre au bar.

 

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