Tunisie : Quelques nouvelles de la guerre sociale en cours …

De nouveaux heurts ont éclaté mercredi soir [24 janvier, NdSAD] entre manifestants et policiers dans plusieurs villes de Tunisie, au troisième jour de contestation provoquée par des mesures d’austérité [1]. A Siliana, dans le nord-ouest, des jeunes ont jeté des pierres et des cocktails molotov sur des flics et tenté de s’introduire dans un tribunal dans le centre de cette ville. La police a riposté par des tirs de lacrymogènes.

Des échauffourées ont également repris à Kasserine, dans le centre pauvre du pays où des jeunes de moins de 20 ans tentent de bloquer les routes par des pneus en feu et jettent des pierres sur les flics. Plusieurs dizaines de manifestants sont descendus aussi à Tebourba, à 30 km à l’ouest de Tunis où a été enterré mardi l’homme décédé lors de heurts dans la nuit de lundi. La police a riposté par des tirs massifs de lacrymogène.. Des scènes similaires ont eu lieu dans des quartiers près de Tunis.

Peu avant, deux villes du bassin minier tunisien ont connu des tensions pour la troisième nuit consécutive suite à l’annonce des résultats d’un concours de recrutement de la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG), principal employeur dans la région. La majorité des sites est à l’arrêt total depuis trois jours, en partie suite aux actions de blocage de la part des chômeurs dans les délégations de Metlaoui, Mdhila, Om Laarayes et Redayef. A Mdhilla, dans le centre du pays, des jeunes ont bloqué une route et mis le feu à des pneus dans la nuit de lundi à mardi. Dimanche soir, la police avait fait usage de gaz lacrymogène pour disperser des manifestants de Metlaoui qui avaient brûlé des pneus. Certains avaient aussi endommagé une succursale bancaire.

Selon un nouveau bilan du ministère de l’Intérieur quelque 237 personnes ont été arrêtées.

[Repris de non-fides et complété, dimanche 28 janvier 2018]


Vendredi 26 janvier, des échauffourées ont eu lieu entre les flics et des centaines de manifestants devant le siège de l’Assemblée des représentants du peuple [2] au Bardo, à l’ouest de Tunis. Appelée en partie par le collectif en lutte contre les dernières mesures d’austérité, Fech Nestanew, la manifestation s’est tenue pour exiger la libération des prisonnier.e.s de la lutte en cours sur fond de loi de la finance.

Samedi 27 janvier à Kairouan, un incendie s’est déclaré au siège de la recette des finances. L’incendie a causé des dégâts matériels. Des équipements bureautiques, des climatiseurs, des portes ont été touchés par les flammes. Selon les enquêteurs, le départ de feu serait dû à un « court-circuit électrique ».

Plus tard, au cours de ce même week-end, un flic a été passé à tabac à Kasserine par quatre enragés non identifiés: le sbire de l’Etat souffre de multiples contusions au visage après avoir essuyé une rafale de coups. Le porte-parole du syndicat de police régional, Mohamed Amri, n’a pas donné de détails sur les motifs de l’agression ni ses circonstances exactes. Mais est-ce nécessaire d’avoir davantage de justifications pour faire manger la poussière à un garant de l’ordre social?

On apprend par ailleurs qu’à Sousse, les agents de la garde nationale de l’unité de recherche et d’investigation, venus interpeller un type vivant de débrouilles (qui était recherché pour vente de boissons alcoolisées dans le quartier de Kondar), ont essuyé des jets de pierres par des gens du quartier. Bien que ces pavés volants avaient pour objectif d’empêcher son interpellation (ce qui a malheureusement échoué), les forces répressives sont repartis avec un de leurs véhicules endommagées.

NdSad:

[1] Depuis début janvier 2018, des révoltes éclatent un peu partout en Tunisie. Bien que la répression féroce du pouvoir a mis un frein à la propagation des émeutes au bout de trois jours, affrontements éparses avec les flics et attaques directes contre les structures de l’autorité se poursuivent.

[2] Nouvelle appellation depuis février 2014 (date de promulgation de la nouvelle constitution) pour parler de l’assemblée nationale où siègent les députés: cette assemblée est majoritairement dominée par le parti d’extrême-droite Ennahda et le parti de gauche démocrate (Nidaa Tounes), qui comptabilisent chacun 69 et 67 sièges (sur les 217 existants).

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