G20 à Hambourg : Trois nuits d’anarchie malgré l’état d’urgence

Le sommet du G20 n’avait pas encore commencer que la répression battait son plein, que les camps d’hébergement étaient en proie aux intimidations et aux expulsions de la police, que de nombreuses personnes suspectées de vouloir prendre part aux contestations ont été arrêtées et pour certaines placées en garde à vue le temps que se déroulent les rencontres des puissants de ce monde.

Le train spécial ZuG20, en partance de Bâle en direction de Hambourg pour les manifestations contre le sommet du G20, a quitté la gare le 5 juillet 2017 avec quatre heures de retard. Sur les 160 personnes qui voulaient le prendre, 32 ont été empêchées de voyager jusqu’à Hambourg : 24 personnes ont reçu des interdictions de voyage et huit ont manqué le train suite à des contrôles volontairement retardés par les polices suisses et allemandes.

Jeudi 6 juillet, la manif « Welcome to Hell », qui a réunit plus de 10.000 personnes, n’a jamais pu partir de la place où la foule s’était rassemblée. En prétextant le fait qu’une partie importante du cortège avait le visage masqué, les flics ont immédiatement stoppé la manif et a chargé la tête du cortège avec leurs matraques et gaz lacrymo.

Lors de la dispersion à coups de canons à eau, de nombreuses personnes ont été blessées et ont du être évacuées par les secours. Hormis quelques échauffourées avec les flics, la situation est restée relativement calme. Un peu plus tard dans la soirée, 4000 personnes sont reparties en manif sauvage, en érigeant des barricades dans les environs du port. Rappelons que cette journée avait débuté par un gigantesque feu dévastateur au centre Porsche du quartier hambourgeois d’Eidelstedt. Par ailleurs, à Ratekau (dans l’arrondissement du Holstein-de-l’Est), une voiture de police de type Mercedes, qui était garée devant le commissariat, est partie en fumée. L’attaque a été revendiquée en ligne sur indymedia linksunten.

Dès le lendemain après-midi, la ville brûlait partout. Des petits groupes de manifestants cagoulés sillonnaient les rues des quartiers, multipliant les foyers d’attaques et d’incendie partout à travers la ville, en mettant le feu aux voitures, en érigeant des barricades et en attaquant les agences du capital. Les flics ont très vite perdu le contrôle de la situation, lorsqu’à Schanzenviertel (quartier du centre autonome de la Rote Flora), et ce pendant près de trois heures, des supermarchés et des commerces se faisaient piller, saccager puis incendier, des banques attaquer… Les autorités ont dû faire appel aux forces spéciales d’intervention de la police (des robocops suréquipés) pour tenter de rétablir l’ordre (ce qui n’a pas tout à fait marché, comme l’ont montré les divers feux de véhicules de leur monde du G20 dans la matinée du samedi 8/07). Alors que les émeutes battaient leur plein, les flics ont mis en ligne un site où toute poucave peut déposer photos et vidéos incriminant des émeutiers.

Des habitants s’improvisent pompiers de la révolte

Le samedi 8 juillet, les journaux du pays font la « une » avec les émeutes dévastatrices de la veille. Au lever du jour, presque plus un seul distributeur de billets ni un seul parcmètre n’était utilisable dans le Schanzenviertel.

Alors que les carcasses de bagnoles étaient encore fumantes, quelques insurgés ont cramé un véhicule du corps diplomatique allemand au petit matin. Le communiqué précise : « tout près du secteur où se déroulait les émeutes (qui méritent d’être saluées) à Schulterblatt, le mini-bus servant au transport des délégations gouvernementales brûlait complètement ». Le quotidien « Die Welt » titre « l’Anarchie à Schanzenviertel jette l’ombre sur le sommet du G20 » qui, pour le coup, résume assez bien la situation. Le climat d’insurrection de la nuit passée est présent dans toutes les têtes et les citoyens se mettent immédiatement au travail en appelant à la délation des « casseurs » et à nettoyer les rues. On peut aussi parler du groupe de la jeunesse de gauche de Hambourg (Le « Linksjugend [solid’] Hamburg », qui est la branche jeunesse du parti de gauche radicale « die Linke ») qui, sur sa page facebook officiel, déverse un flot de saloperies en appelant les flics « camarades » et à « dénoncer les auteurs de violence ayant attaqué les policiers pendant le sommet du G20 et menace de faire eux-mêmes venir les policiers dans les camps d’hébergement dans lesquels séjournent ces mêmes « Gewalttäter ».

La riposte de l’État à cet échec manifeste de contrôle de la contestation anti-g20 ne se fait pas attendre. Des escadrons de flics de la LKA (Landeskriminalamt) envahissent le quartier de Sankt-Pauli et perquisitionnent le centre social internationaliste B5 au 5 de la Brittenstraße. Lors de cet assaut policier, la cave du cinéma voisin B-Movie ainsi que la FoodCoop ont également été perquisitionnées et deux personnes blessées.

La grande manif du 8 juillet, « Plutôt la solidarité sans frontière que le G20 » a été durement réprimé bien qu’elle a été assez calme. Les flics ont attaqué plusieurs manifestants et les ont extirpés du cortège pour les arrêter. Dans toute la ville, notamment les gares et les hôtels, les flics ont mené la chasse à toute personne correspondant à l’image de l’émeutier venu de l’étranger parlant français, italien ou espagnol.

Malgré ces multiples assauts policiers dans une ville en état de siège et cédant à la paranoïa générale, les émeutes ont repris dans le quartier de Schanzenviertel dans la nuit de samedi à dimanche, renvoyant un peu de la violence subie à la gueule des flics.

Bilan officiel des trois jours d’émeutes

Entre jeudi 6 et dimanche 9 juillet, 476 policiers ont été blessés sur les 20.000 mobilisés au total (venus de toute l’Allemagne) pour assurer le déroulement du sommet. 4000 policiers ont été appelés en renfort lorsque la situation est devenue incontrôlable (ven. 07/07 en fin de journée). De nombreux véhicules de police ont flambé ou ont été sérieusement endommagés pendant ces journées du G20. L’hôtel dans lequel dormait Emmanuel Macron s’est fait caillasser et plusieurs chefs d’Etats (dont Trump) sont restés bloqués dans leurs hôtels en raison du climat insurrectionnel qui régnait dehors. Le déroulement du sommet en lui-même a été fortement perturbé par des actions de blocage qui ont retardé les arrivées des chefs d’Etat. D’après certaines sources, il y aurait eu près de 70 manifestants hospitalisés. D’après le directeur de la police d’Hambourg, Hartmut Dudde, 186 personnes ont été arrêtées et 225 placées en détention provisoire. Sur l’ensemble des personnes arrêtées, 132 sont originaires d’Allemagne, 9 viennent de Suisse (dont 4 d’entre elles ont été directement relâchées; 5 émeutiers présumés ont été placés en GAV. On ignore le nombre de personnes toujours détenues mais nous savons qu’un ressortissant suisse de 29 ans originaire de Zurich, à qui il est reproché d’avoir brisé deux vitres et d’avoir frappé de plusieurs coups de poing un passant qui critiquait sa manière d’agir, est toujours en détention provisoire avec 50 autres personnes dans la prison de Dammtor de Hambourg), 8 de France (dont une venant de Paris) et 7 d’Italie. D’autres personnes sont originaires de Turquie ou de Russie. Elles resteront apparemment en détention le temps du déroulement de l’enquête. Selon la police, il y a eu 37 mandats d’arrêt contre des émeutiers présumés.

[Résumé d’articles de la presse allemande]


Quelques messages de solidarité avec les révoltés de Hambourg pendant et après le G20 :

A Solothurn, en Suisse

idem « De Solothurn à Hambourg, nique la police »

A Vienne, en Autriche

Crête, Grèce

A Peristeri, en Grèce

A Athènes, sur les grilles de l’institut de Polytechnique

Banderole suspendue à Exarchia, à Athènes. « Solidarité avec les émeutiers No-G20 »

A Besançon, France:

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